Les signes de généralisation associés à un groupe et à une caractéristique : ils sont tous corrompus… Les mots comme tous ou leurs autres formulations : « Les Américains (= tous les Américains), les Blancs (= tous les Blancs) » sont des indices. Jamais, toujours, aucun sont autant de pistes additionnelles. Le préjugé est une attitude qui se traduit par le langage verbal mais aussi par le langage corporel. Dans la communication, ce dernier est en général spontané et inconscient. Lorsqu’un préjugé est négatif, l’attitude se manifeste par exemple à travers les signes corporels du dégoût, du rejet, de l’évitement, de la condescendance… Encore faut-il pouvoir les distinguer. Sur ce sujet, lire : Loris Tamara Schiaratura, Analyse et interprétation psychologiques des comportements corporels en situation de communication interpersonnelle, 2013. http://methodos.revues. org/3013 Stéréotypes, préjugés et discriminations Jean-Baptiste Légal & Sylvain Delouvée, Dunod, 2008 Contes philosophiques de la diversité Évelyne Lagardet & Michel Tubiana, Eyrolles, 2010Quatre concepts
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Comment faire pour… déconstruire les préjugés. Épisode 1
Posted on 28 April 2016 in Comment faire pour, Déconstruire les préjugés, Eve, n'GO Blog, Pierre Biélande, Préjugé, préjugés, Relations humaines, Tékitoi
comment faire pour…
déconstruire les préjugés. Épisode 1
Des catégories aux stéréotypes
« Tous corrompus, tous fainéants. Tous des voyous. Toujours en retard. Jamais à l’heure. » Ces mots simplificateurs, ces généralisations sont l’essence même du préjugé. Ils révèlent le refus ou l’ignorance d’une réalité plus complexe.
On voudrait pouvoir s’en séparer mais la réalité est que tout le monde en a. Le préjugé est « naturel ». Impossible de ne pas en avoir. Faut-il pour autant baisser les bras ? Non, il existe des méthodes et des manières d’être qui facilitent sa déconstruction.Dire du préjugé qu’il est naturel, n’est pas le colorer en bien ou en mal. Il s’agit simplement de constater son existence chez tout le monde. Car tous, nous développons des attitudes positives ou négatives à l’égard d’un groupe donné. Dans un contexte de repli identitaire s’accentuant en Europe, s’intéresser à la question présente un intérêt majeur. Vouloir s’attaquer à un préjugé est difficile et dé- bouche trop souvent sur la mise en état de stress des gens qui ont ce préjugé, surtout lorsque celui-ci est puissant. Enervement, colère, évitement, silence sont des réactions coutumières. L’expérience montre qu’on ne peut pas obliger ni une personne ni un groupe à revoir un préjugé. Les entraîner de force sur ce terrain aurait plutôt l’effet contraire : les conforter dans leur vision. C’est au groupe ou à la personne de faire le chemin. Le principe que nous développerons dans les articles qui suivront est de nous inviter à regarder les choses autrement, à apporter de la nuance, de la curiosité, de la relativité dans la manière de regarder l’autre. Plus facile à dire qu’à faire…
Le préjugé construction du cerveau et construction sociale
Qu’est-ce qu’un préjugé et comment se forme-t-il ? En quoi est-il inhérent à la condition humaine ? A ces questions, les scientifiques répondent en identifiant trois sources spécifiques que nous détaillerons. La première est liée à la socialisation, en l’occurrence la transmission des normes, des valeurs, des usages, de la culture, etc. La deuxième réside dans le fonctionnement des groupes entre eux et à l’intérieur du groupe. La troisième source est celle du cognitif ou autrement dit de la manière dont le cerveau fonctionne pour appréhender le monde. Cette dernière offre des pistes d’action importantes et nous pousse à nous intéresser à quatre mécanismes cérébraux à l’œuvre dans la création des stéréotypes : la catégorisation, l’omission, la généralisation et la distorsion.
Catégoriser une compétence essentielle
Selon des recherches menées depuis les années quatre-vingts, les bébés disposent déjà à la naissance d’une capacité à créer des catégories de base. Dès les premiers mois, ils regroupent des objets selon la couleur, l’orientation ou encore la forme.
Or, créer des catégories est une habilité essentielle pour le fonctionnement des êtres humains : cela permet de réduire la complexité, la quantité et la diversité du monde qui nous entoure. C’est aussi l’occasion de relier les informations entre elles et de ne pas devoir les traiter de manière individuelle. Créer des catégories a également pour avantage de mémoriser plus facilement l’information et de la restituer. Enfin, cela permet de mettre en place des mécanismes logiques d’inférence : à partir d’une assertion considérée comme vraie, il est possible de considérer une autre affirmation comme étant vraie en utilisant des règles précises. On comprend toute l’importance de ce mécanisme pour les êtres humains, mais aussi les biais qui vont en naître. Car créer des catégories implique de mettre en avant une caractéristique commune à un groupe. On exagère alors la similarité entre les représentants d’un même groupe. Parallèlement, les différences entre des personnes appartenant à deux groupes différents sont elles aussi accentuées. La catégorisation induit l’augmentation du sentiment de différence entre les groupes et renforce le sentiment de préférence accordé au groupe auquel on appartient. La catégorisation est le marchepied qui mène au stéréotype.
Décatégoriser, première possibilité d’action
Des scientifiques tels que Gaertner ont exploré la possibilité de travailler sur un mécanisme de décatégorisation allant de pair avec de l’individuation. Lors d’une expérience qui sera répétée par la suite, des volontaires étaient invités à regarder les membres d’un autre groupe comme des individus dotés de caractéristiques et d’opinions personnelles propres et non plus comme les membres d’un autre groupe. En poussant le principe à sa limite les chercheurs en sont arrivés à décatégoriser les membres des deux groupes. Il n’y avait plus que des individus. Cette méthode peut être efficace pour soi-même lorsqu’on cherche à dé- construire un préjugé sur quelqu’un basé, par exemple, sur son appartenance religieuse ou sa nationalité. Mais, elle fait aveu de faiblesse pour les personnes qui ont des préjugés sur un groupe donné et qui n’ont aucune raison particulière de se prêter à pareille expérience. Plus embêtant encore, comme l’appartenance à un groupe semble être l’un des fondements de la vie humaine, personne n’a vraiment envie de détricoter son identité sociale pour, par exemple, abandonner son identité belge, wallonne, bruxelloise, flamande pour une identité européenne… La technique n’est donc valable que pour des personnes d’une extrême bonne volonté qui veulent consciemment dépasser les barrières du préjugé.
PIERRE BIÉLANDE